Comprendre pour servir ce monde où je vis

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Bien paraître !  Le plus gros problème pour un drogué… comme moi ?

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Voici une préparation pour les deux commentaires à venir sur Matthieu 23.  Si vous avez le temps, laissez-moi vous raconter une histoire.  Il y a quelques années, lorsque je travaillais au pénitencier, j’ai aidé à commencer et maintenir un programme de désintoxication à l’intérieur du pénitencier.  C’était un programme innovateur, une première en milieu carcéral.  J’ai beaucoup aimé l’expérience, mais quelque chose m’a beaucoup touché et ouvert les yeux.  Le programme que nous avions développé s’appuyant sur le programme de réadaptation en toxicomanie – Portage, les toxicomanes ne devaient pas simplement travailler sur leurs problèmes de consommation de drogue, mais principalement sur leurs problèmes personnels qui les amenaient à consommer.  À quoi sert de travailler sur le symptôme (la consommation) si tu ne règles pas le problème à la source.  Et dans tous les problèmes qu’une personne peut avoir; violence, abus, mensonge, agression, vol, sexualité, etc., il y en avait un qui surpassait tous les autres. Pour eux, ce problème devenait l’origine de tous les problèmes, la source.  Le problème que personne ne pouvait accepter, car il menait irrémédiablement à tout les autres problèmes et éventuellement la consommation. 

Ce problème avait un nom :  « Bien paraître ».  Ce problème, source de tous les autres, était identifié avec ce nom.  En aucun cas il ne fallait faire du « Bien paraître ».  On reprenait tout de suite celui qui faisait du « Bien paraître » et il y a avait des conséquences graves.  Même les gardiens, qui travaillaient dans ce programme, comme intervenant n’avaient aucune excuse de faire du « Bien paraître ».

Un bon jour nous avons reçu la visite du sous-commissaire des pénitenciers québécois !  Wow, quelqu’un d’important.  Il a donc fallu que tout le monde, détenus et gardiens fassent un ménage spécial pour recevoir ce personnage.  Je me souviendrai toujours, quand nous avons demandé à chacun de faire ce ménage spécial.  Les détenus se sont tournés vers nous et nous ont accusés de faire du « Bien paraître », et pensaient qu’il faudrait accuser le directeur du pénitencier de faire du « Bien paraître ».  Et ils avaient bien raison.  Si ce problème est si grave, il est inconcevable qu’il soit accepté pour qui que ce soit.

Ces jours-ci, le sujet du texte de l’évangile de Matthieu va être très difficile. Hier, j’ai révélé le problème d’orgueil des ouvriers croyants.  Demain, nous parlerons des hypocrites, encore parmi les ouvriers croyants.  Est-ce que je dois en parler ?  Est-ce que je devrais donner les noms de ceux que j’ai vu être des orgueilleux et des hypocrites ?  Certainement, je devrais révéler ces fautifs et ne pas le faire serait faire du « Bien paraître ». 

Je jongle avec cette mauvaise attitude de ma part qui cache ce dont j’ai été témoin.  Je vis durement la culpabilité d’être témoin et ne pas révéler.  Je suis rongé par ce choix de dire ou ne pas dire.  Pourquoi est-ce que je dirais ce que personne ne veut savoir de toute façon ?  Quand tout va mal je ne veux pas entendre parlé de mes péchés, mais quand tout va bien je ne veux pas en entendre parler non plus, car pourquoi gâcher la joie.   Il y a toujours une bonne raison pour se taire et faire du « Bien paraître ». 

En passant, je n’ai jamais dit au directeur du pénitencier qu’il faisait du « Bien paraître ».  En agissant ainsi, c’est moi qui ai fait du « Bien paraître ».  Et j’ai été dans leur réunion pour confesser que j’avais fait du « Bien paraître » en ne disant rien au directeur. Ça n’a pas réglé le problème du directeur, mais c’était la première fois qu’un gardien venait confesser sa faute devant le groupe de toxicomanes. Je pensais qu’il était important de confesser, comme il nous est enseigné dans Jacques 5.16 :

« Confessez donc vos péchés les uns aux autres, et priez les uns pour les autres, afin que vous soyez guéris. La prière fervente du juste a une grande efficace. »

Dans les prochains jours, je vais faire du « Bien paraître ».  Nous parlerons du problème dont parle Matthieu, mais aucun nom ne sera révélé.  Je vais faire du « Bien paraître » et me consoler en me disant que vous aussi vous connaissez ces personnes et vous ne dites rien.  Vous faites du « Bien paraître ».  Et qui viendra nous reprocher de ne pas révéler le péché d’un pasteur, d’un directeur de mission !  Hmm… Dieu un jour ? 

Pas facile d’éteindre la conscience et de faire du « Bien paraître ».  Il faut croire que je suis aussi un toxicomane, esclave de mon amour propre, car lorsque je révélerai ce dont j’ai été témoin, je serai lapidé par des croyants, et les pierres spirituelles font très mal ! 🙁

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